dimanche 21 octobre 2012

La parité des sexes

Certains féministes prônent la parité des sexes dans certains domaines. C'est-à-dire que, pour eux, on devrait activement prendre des mesures pour qu'on y trouve exactement autant d'hommes que de femmes. Par exemple, certains partis politiques veulent qu'il y ait autant d'hommes que de femmes parmi les ministres. D'autres fois, il s'agit simplement de prendre des mesures pour attirer les membres de l'autre sexe ou faciliter leur embauche dans une discipline majoritairement dominée par un sexe. Évidemment, tout cela va directement à l'encontre de mon antisexisme, puisque ça reconnaît l'existence des sexes. C'est une mesure qui se situe dans un autre paradigme que le mien. Néanmoins, certains arguent que de faire de la discrimination positive est une phase nécessaire dans la lutte contre la discrimination, et que nous pourrons donc éventuellement abandonner ce genre de pratiques mais uniquement lorsque les mentalités auront changées. Faisons donc l'exercice d'y réfléchir.

Je pense qu'avant de viser la parité dans un domaine quelconque, il faudrait nous poser deux questions:
  • Pourquoi y a-t-il significativement plus de membres d'un sexe que de l'autre dans ce domaine?
  • Pourquoi serait-il nécessaire qu'il y ait autant d'hommes que de femmes dans ce domaine?

Ces deux questions me semblent fondamentales. La première nous permettra de savoir quelles seront les mesures légitimes pour briser cette prédominance d'un sexe. Si, par exemple, on constate qu'il y a moins de femmes dans tel domaine parce que les employeurs les discriminent, on pourra envisager la discrimination positive comme étant un moindre mal. Si, par contre, il y a tout simplement significativement moins de femmes parmi les postulants, exiger un quota de femmes devient une discrimination non légitime. Prenons la situation suivante:

Un employeur a dix postes à combler. Parmi les postulants qu'il a passé en entrevue, il y en a eu vingt qui se sont démarqués et qui semblent tous également valables. Sur ces vingt, quinze sont des hommes et cinq sont des femmes. Le programme d'accès à l'égalité de son entreprise lui impose de prendre, pour les dix postes à combler, cinq hommes et cinq femmes.

Si on réfléchit un peu à cette situation, on se rend compte qu'il y a discrimination. Parmi les vingt postulants de valeur égale, les femmes sont assurées d'être embauchées tandis que les hommes n'ont qu'une chance sur trois. Ainsi, la variable «sexe» va à elle seule tripler les chances d'embauche de l'individu. Si la faible présence féminine dans un domaine est due au fait que les femmes y sont moins intéressées, la solution serait tout simplement de faire la promotion de celui-ci auprès des femmes. Les discriminer positivement à l'embauche serait une injustice, comme en témoigne la mise en situation précédente.

Souvent, ce sont les traditions qui font qu'une personne va se sentir moins à l'aise d'aller dans une discipline majoritairement dominée par l'autre sexe. Parfois, aussi, c'est que c'est un domaine qui exige de hautes études et que les femmes seront en général plus enclines à s'occuper de leurs enfants plutôt que de faire un doctorat. Dans ce genre de cas, il y a de l'éducation à faire afin que chacun puisse prendre conscience qu'il peut faire ce qu'il veut quelque soit son sexe. Toutefois, on doit respecter la liberté des gens. Si une femme veut aller dans une discipline qui est traditionnellement féminine, c'est son choix. On ne doit pas forcer les choses et cela prendra peut-être plus d'une génération avant que l'on atteigne une relative parité.

Dans d'autres cas, ce peut être parce que les exigences de l'emploi sont des traits fortement corrélés avec le sexe de la personne. Par exemple, dans une entreprise de déménageurs de pianos, quelle approche devrait avoir l'employeur? Engager autant d'hommes que de femmes (quitte à avoir des critères de sélection et des définitions de tâches différents pour chaque sexe mais en les payant le même prix)? Refuser systématiquement toute les femmes sans même les évaluer? Non. L'employeur de l'entreprise de déménageurs de pianos devrait engager les individus pour leurs compétences personnelles et non pour celles de la moyenne de leur sexe. Oui, il aura alors probablement beaucoup plus d'hommes que de femmes qui auront les compétences requises. Peut-être même n'aura-t-il que des hommes parmi ses employés. Mais ce ne sera pas parce qu'il discrimine les femmes. Entre un homme gringalet et une femme très bâtie, il choisira la femme. Bref, mon point de vue est qu'un employeur ne devrait tout simplement pas considérer le sexe du postulant mais se fier uniquement à ses compétences, même lorsque celles-ci sont fortement corrélées avec son sexe.

Maintenant, par rapport à la deuxième question que j'ai soulevé au début, c'est-à-dire «Pourquoi serait-il nécessaire qu'il y ait autant d'hommes que de femmes dans ce domaine?» Je pense que c'est également nécessaire de se la poser. Deux réponses contraires sont possibles:
  • Parce que les hommes et les femmes sont fondamentalement semblables conséquemment l'absence de parité est forcément le symptôme du sexisme;
  • Parce que les hommes et les femmes sont fondamentalement différents et que cette discipline a besoin de leurs deux approches complémentaires;

Ma réponse à moi serait plus proche de la première. C'est pourquoi je ne vois pas la parité comme nécessaire dans les domaines où elle est due à des choix personnels et libres, à des compétences directement corrélées avec le sexe (la force physique de l'homme) ou au seul hasard. Mais le féminisme de la culture dominante, qui a une approche plus «séparés mais égaux», va généralement opter pour la deuxième réponse. C'est pourquoi certains partis politiques vont s'efforcer d'avoir la parité au sein de leurs troupes. Ce n'est pas pour que les hommes et les femmes aient les mêmes chances en politique, c'est pour que leurs politiciens représentent équitablement les intérêts des deux sexes. Pour ma part, je dirais que je ne suis pas forcément mieux représenté par quelqu'un simplement parce qu'il est du même sexe que moi. Ses opinions politiques m'importent davantage que son anatomie génitale.

1 commentaire:

  1. Ou alors – comme tu le précise d'ailleurs à un moment donné - on combat sur le terrain de la parole pour changer les mentalités sans avoir à faire de discrimination positive. Je suis de ceux qui s'insurgent de voir certaines sous représentations des femmes ou des hommes dans certains domaines, ou disons plutôt de ce milieu culturel qui tend à définir les individus en dépit des diversités (avec pour conséquence un mépris social de ceux qui s'écartent des "normes") et en tant que tel j'ai l'impression que tu frappes un épouvantail quand tu dis "Certains féministes prônent la parité des sexes dans certains domaines. C'est-à-dire que, pour eux, on devrait activement prendre des mesures pour qu'on y trouve exactement autant d'hommes que de femmes".
    Je comprends et je partage ton point de vu, mais ta phrase manque de nuance à mon avis.

    Cordialement.

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