lundi 31 mai 2010

Miser sur le mauvais dieu

Une des objections principales à des arguments fallacieux tels que celui du pari de Pascal, est qu'il existe de multiples religions et que, par conséquent, il est arbitraire de considérer l'une d'entre elles comme l'unique vérité simplement parce que c'est celle dans laquelle on a grandi. Si un missionnaire vous le sert, proposez-lui cet exercice de relativisme culturel:
Imaginons que vous ayez raison et que c'est bel et bien le christianisme (ou l'islam, ou le raëlisme, c'est selon l'identité religieuse de votre interlocuteur) qui détienne la Vérité. Mais supposons que vous ne soyez pas né dans une famille de chrétiens mais ayez plutôt été élevé par des hindous (ou toute autre religion sur laquelle votre interlocuteur a très peu de connaissances) dans un milieu totalement hindouiste. Et disons que vous connaissiez aussi peu le christianisme que ce que vous connaissez de l'hindouisme présentement.

Dans ce contexte, à quelle religion adhéreriez-vous d'après vous? Auriez-vous quitté la religion de vos ancêtres pour adopter un culte étranger dont vous ne savez rien? Ou, plus vraisemblablement, seriez-vous tout aussi convaincu de la véracité des croyances hindoues que vous l'êtes des croyances chrétiennes en ce moment?

Cet exercice invite notre croyant à constater qu'il a une foi particulière, non pas parce qu'il a étudié toutes les religions et constaté que la sienne était la plus plausible, mais simplement parce qu'il a été élevé dans cette tradition particulière et ne l'a simplement jamais soumis au filtre de la raison. Si, en effet, il admet qu'en ayant été élevé dans une autre religion il croirait en une autre religion, qu'est-ce qu'il lui permet d'affirmer que sa religion actuelle est la Vérité et qu'il n'y adhère pas uniquement parce qu'il a grandi dedans?

dimanche 23 mai 2010

La solidarité sociale

Dernière mise à jour : 16 mars 2011

Je réfléchissais au concept de solidarité sociale. Une société porteuse de causes systémiques rendant l'existence de la pauvreté inévitable, se doit éthiquement de compenser cette lacune par la présence d'une aide aux démunis. Contraindre certaines personnes à vivre dans des conditions où la survie est difficile, voire impossible, revient au même que ne pas leur accorder le droit de vivre. Il est donc nécessaire que l'État offre à chacun les outils indispensables à la survie.

Mais je me disais que le bien-être social qui est actuellement en vigueur comportait plusieurs failles:
  • ce revenu est versé pour que la personne puisse subvenir à ses besoins fondamentaux et à ceux de ses enfants, mais il lui est possible de s'en servir pour s'acheter de l'alcool ou des cigarettes;
  • certaines personnes peuvent flouer le bien-être en recevant ce revenu sans y avoir droit;
  • il peut dissuader certaines personnes de retourner travailler si la différence entre leur revenu sans emploi et le revenu qu'elles auraient en travaillant n'est pas suffisante à leurs yeux pour que ça vaille la peine de travailler;

Voici donc ma proposition pour rectifier la situation:
  • Que le bien-être social ne soit plus en argent mais en «bons d'achats» valables seulement pour acheter des choses «fondamentales» dans tous les commerces de la province;
  • Que ce soit un revenu d'existence versé à tous les citoyens résidents et pas seulement aux sans-emplois;

J'entends par «choses fondamentales» de la nourriture (sauf la malbouffe), des vêtements et des produits d'hygiène. Donc si le revenu que l'on obtiendrait en travaillant nous permettrait autant de nous acheter des choses fondamentales que du luxe, le revenu d'existence fourni par l'État ne nous permettrait pas d'acheter des produits de luxe.

Pour le logement, je propose que l'État paye une partie du loyer de chaque foyer en fonction de ses besoins. Le montant payé par l'État serait spécifié sur le bail et versé à chaque mois directement au propriétaire, tandis que le locataire n'aurait qu'à payer la différence. Le bail deviendrait donc une entente entre trois parties: le locataire, le propriétaire et l'État. Même principe pour ceux qui sont propriétaires de leur habitat; l'État rembourserait mensuellement une partie de leur hypothèque directement à leur banque et eux paieraient le reste.

Personnellement, je me dis que l'argent que l'on verse aux assistés sociaux ne leur appartient pas vraiment; c'est celle de l'ensemble de la société. Ainsi, s'il est indispensable pour une société progressiste d'avoir une solidarité sociale envers ses membres les plus démunis, il n'est pas légitime de payer du luxe à des gens qui ne veulent pas travailler. Donc s'il est du devoir de l'État de fournir du pain ou des légumes à sa population, il n'est pas tenu de lui offrir des chips, des cigarettes ou des billets de cinéma.

On doit s'assurer que la redistribution des ressources se fasse de façon respectueuse des efforts des travailleurs en ne servant qu'à soutenir financièrement les gens plus démunis, pour leur permettre éventuellement de retourner au travail si c'est possible dans leur situation. Certains trouvent peut-être que ma proposition est contraignante pour la liberté des assistés sociaux, voire qu'elle les infantiliserait et portrait atteinte à leur dignité. Pour moi c'est tout le contraire. Actuellement, les gens sur le bien-être ne reçoivent pas assez d'argent pour pouvoir vivre dans des conditions décentes. Les contribuables sont pourtant réticents à ce que l'on augmente la somme d'argent qu'on leur verse parce qu'ils ont en tête la vision stéréotypée du BS paresseux qui ne veut pas travailler et qui dilapide l'argent du gouvernement dans l'alcool ou la cigarette. Ma proposition permettrait de rassurer les contribuables quand à l'usage que font ces gens avec leur argent, et ils seront ainsi plus enclin à accepter que l'on augmente ce revenu.

mercredi 5 mai 2010

Définition de l'être

Permettez-moi de clarifier la définition que je donne au mot «être» sur ce blogue, c'est-à-dire dans une perspective où l'esprit n'existe pas en-dehors de la matière.

L'être se distingue de l'objet par le fait qu'il est capable de percevoir son environnement (donc d'en construire mentalement une sorte de copie virtuelle incomplète) et d'attribuer à chaque stimulus qui le compose une connotation positive ou négative. Ainsi, il pourra non seulement distinguer deux saveurs, mais il pourra également en préférer une à l'autre. J'appelle ces deux facultés «conscience» et «volonté». C'est donc à un niveau relativement primitif que l'être se dote d'une «jauge» opposant son bonheur et sa souffrance; c'est-à-dire ce qui lui est agréable et désagréable. Pour moi, cela justifie d'adopter l'éthique utilitariste et de l'étendre à tous les êtres (dans la mesure du possible). C'est par la sélection naturelle que les êtres seront «programmés» pour trouver désirable ce qui a des chances d'être utile à leur autoconservation et à leur reproduction.

À partir du moment ou une entité possède les critères minimaux que j'ai décris ci-haut (capacité de percevoir et d'apprécier), elle peut revendiquer au titre d'être. Aussi douce que soit la pente d'une plage, la démarcation entre la terre émergée et la terre submergée n'en sera pas moins nette. Pour moi, donc, l'obtention du titre d'être – et donc le droit à la considération selon l'éthique – se fait indépendamment de sa proximité génétique d'avec l'humain. Un vivant dont l'ancêtre commun avec nous est très lointain, un extraterrestre ne partageant aucun ancêtre avec nous ou un robot ayant une intelligence artificielle programmée comme la nôtre, mériteraient donc tous d'être considérés comme des êtres s'ils en possèdent les attributs.

Il y a bien sûr un dégradé de nuances qui existe entre l'être et l'objet; l'univers est un continuum. Je classe dans cette zone grise les systèmes complexes sans conscience propre tels qu'une population d'animaux (les individus qui la composent sont des êtres mais pas la population en tant que tout) ou un programme informatique. J'y mets aussi les vivants acéphales tels que les végétaux. N'ayant pas de facultés sensorielles ou de système nerveux central, ils sont pour moi moins des êtres vivants que des objets vivants. L'être émerge quand un système complexe acquiert les facultés de l'être ce qui implique un degré élevé de complexité.

L'être que je suis est la somme des interactions entre ses neurones. L'émergence d'un être pourrait se faire à n'importe quelle échelle. Ainsi, il n'est pas exclu d'imaginer qu'un jour les populations d'animaux eusociaux – qui forment littéralement des superorganismes – acquièrent une conscience collective analogue à celle des individus. Il leur suffirait pour cela d'intensifier et de complexifier leur rapport de communication. Par exemple, imaginons une cité futuriste dans laquelle chaque citoyen est en contact télépathique permanent avec tous les autres (je sais que c'est impossible, j'ai dis «imaginons…»). Supposons qu'à chaque fois qu'un individu a une idée ou perçoit quelque chose, cette information soit transmises instantanément à tous les autres citoyens se trouvant dans un rayon d'un kilomètre. Que se passerait-il? Mon hypothèse est que cette somme d'individus deviendraient comme un unique être, ayant une conscience et une volonté, de la même façon que la somme de mes cellules.