samedi 17 octobre 2009

Fondements des droits de l'enfant

J'ai réfléchis aux droits des enfants, par rapport aux droits et devoirs qu'ont leurs parents sur eux, ou aux droits et devoirs qu'a la société d'interférer ou non dans la relation parent/enfant. C'est une situation qui m'apparaît délicate et compliquée à analyser. Il y a plusieurs variables qui s'interfèrent mutuellement pour poser les limites et légitimer les droits et devoirs parentaux. Je vais donc essayer de démêler tout ça en partant de la base. En gros, ça se résume en :

  • L'enfant est un être
  • Il manque de lucidité
  • Il n'a pas choisi de venir au monde
  • C'est un adulte potentiel

D'abord, l'enfant est un être. À partir du moment où l'embryon possède un système nerveux actif (mais pas avant), il est légitime de lui accorder minimalement le droit d'être protégé de la souffrance, de rechercher le bonheur et de perpétuer sa propre existence. À cela s'ajoute le fait qu'il a des proches qui tiennent à lui et qui souffriraient s'il lui arrivait quoique ce soit. Donc ça c'est notre point de départ, mais si on s'arrête là, nul n'a de devoir envers l'enfant et celui-ci n'a de compte à rendre à personne. Pourquoi ses parents devraient-ils s'occuper de lui? Pourquoi devrait-il obéir à ses parents? Poursuivons notre réflexion…

Un être doit posséder un minimum de lucidité pour qu'on lui laisse la liberté de faire ses propres choix sans lui imposer de contraintes. Si un individu veut s'adonner à une activité mauvaise pour lui, on doit lui expliquer en quoi cela va lui nuire. Mais si, dans le cas d'un enfant par exemple, il est trop peu lucide pour réaliser qu'il se nuit à lui-même, on se doit de le contraindre. Toutefois, cette coercition sur l'individu ne conserve sa légitimité que si on ne lui impose des choses pour son bien et seulement dans les domaines où il manque de lucidité. Il serait fallacieux d'utiliser cet argument pour asservir totalement un être moins rationnel que nous à notre volonté en suivant exclusivement nos intérêts personnels.

Je ne pense pas que les parents aient un quelconque droit divin/naturel/magique sur leurs enfants. D'un point de vue très terre-à-terre, la génitrice et son rejeton sont deux individus distincts. J'aimerais souligner cependant que l'enfant n'a pas choisi de venir au monde, ce sont ses géniteurs qui ont pris cette décision pour lui. Qu'est-ce que ça implique? D'abord que ceux qui choisissent d'engendrer un nouvel individu s'engagent tacitement à s'assurer que celui-ci ait de bonnes conditions d'existence durant la première partie de sa vie, pendant laquelle il est plus vulnérable et dépendant. Les géniteurs peuvent remplir ce devoir en devenant eux-mêmes les parents de cet enfant ou en veillant à ce qu'il soit adopté par d'autres.

Cela implique aussi le devoir pour la société d'accorder un minimum de lousse aux parents quant à la façon dont ils élèveront leurs enfants. Si on interdit aux parents potentiels de choisir les contingences culturelles (religion, langue, valeurs, etc.) qu'ils transmettront à leurs enfants, ils n'auront plus aucune raison de faire des enfants. Et je ne pense pas que cela lèse d'une quelconque façon la liberté de l'enfant d'être ce qu'il veut, en autant qu'on lui présente le plus tôt possible les autres alternatives et que le parent accorde aussi à son enfant un minimum de lousse dans ses choix de vie.

Autre facteur, c'est que l'enfant est un adulte potentiel. Nous avons des devoirs envers les gens du futur. Conséquemment, en plus d'avoir des devoirs envers cet enfant, nous en avons aussi envers l'adulte qu'il deviendra. Les droits de cet adulte du futur viennent limiter ceux de l'enfant qu'il est, de ses parents et de la société en général. L'enfant «appartient» à l'adulte qu'il sera, c'est pourquoi il faut le prémunir contre ses propres choix irrationnels et préserver son intégrité, même contre son gré, afin qu'il ait toutes ses facultés une fois adulte pour disposer de lui-même. C'est sur ce point, je pense, que le statut de l'enfant diffère de celui d'un adulte qui aurait une déficience cérébrale le rendant intellectuellement équivalent à un enfant.

Par exemple, imaginons qu'un enfant veuille se faire tatouer un dessin sobre à un endroit peu visible. On ne pourrait pas invoquer le critère du manque de lucidité puisque son choix ne lui nuit pas et n'est pas irrationnel. On pourrait même invoquer son droit de disposer de lui-même. Mais, paradoxalement, je considère que c'est justement notre droit de disposer de nous-mêmes, en tant qu'adulte, qui justifie cette contrainte de la liberté de l'enfant. J'ai pris le tatouage pour exemple mais j'aurais pu prendre le perçage (que l'on impose aux fillettes), la consommation d'une substance particulièrement dommageable pour la santé (ex. : drogues) ou certaines mutilations religieuses (circoncision et excision). Tout cela devrait être réservé aux adultes.

Je conclus en vous rappelant qu'il est parfaitement arbitraire de fixer un âge donné (18 ans) à partir duquel on confère à l'individu tous les droits et responsabilité d'un être libre et lucide mais en deçà duquel il est sous la tutelle de quelqu'un d'autre. Évidemment, la sagesse voudrait que l'on fasse plutôt passer des tests psychométriques à chaque individu pour mesurer la progression de sa maturité et lui donner les droits qu'il mérite et les devoirs qu'il peut assumer. Toutefois, en donnant progressivement les droits d'adultes à plusieurs âges (par exemple, on peut conduire dès 16 ans) et en adoptant des mécanismes pour reclasser ponctuellement les individus d'exceptions (mineurs émancipés et adultes sous tutelle) on ajuste l'imperfection inhérente à une telle généralité tout en nous épargnant la tâche laborieuse d'évaluer chaque individu.

2 commentaires:

  1. une réflexion intéressante, très.
    Pourrais-tu développer sur les parents eux-même pas très lucides qui mettent des enfants qui ne l'ont jamais demandés à être au monde?

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  2. Ton approche de l'enfant et de ses droits est pertinente.
    Mais si jamais tu es curieux et que tu veux réellement comprendre les divers droits des enfants je te conseille de jeter un coup d'oeil sur le site : www.droits-enfant.org.
    Tu verras c'est très intéressant!

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